Rapport annuel 2022 : entretien avec Louis Nègre, président du GART

    La publication du rapport annuel 2022 est l’occasion pour le président du GART de revenir sur les actions entreprises par l’association ces derniers mois et de porter un regard sur les défis à relever : modèle économique, crise énergétique, titre unique… Intitulé « Une ambition commune, des propositions concrètes », ce document de référence met par ailleurs en exergue l’ensemble des initiatives que le GART a menées tout au long de l’année 2022.

    C’est dans un esprit de sérieux et de responsabilité que le GART accompagne au quotidien ses adhérents tout en anticipant ce que pourraient être les mobilités de demain.

    Réchauffement climatique, crise énergétique et enjeux économiques sont sources d’inquiétude pour nombre de nos concitoyens. Comment le GART agit-il à son niveau dans ce contexte particulier ?

    C’est dans un esprit de sérieux et de responsabilité que le GART accompagne au quotidien ses adhérents tout en anticipant ce que pourraient être les mobilités de demain. En 2022, nous avons porté sept propositions prioritaires. Elles sont détaillées dans ce rapport annuel ; elles témoignent de notre engagement pour améliorer la mobilité de nos concitoyens. Ces propositions sont d’autant plus d’actualité que la transition écologique et énergétique est devenue un enjeu prééminent. Chaque année, le changement climatique se fait davantage ressentir et nous devons agir concrètement pour y faire face afin de garantir un avenir digne aux générations futures. Elles nous jugeront sévèrement si nos actes ne sont pas en accord avec nos engagements. Élus et techniciens, chacun est mobilisé et agit avec le souci du service public et de l’intérêt général pour porter la culture « mobilité durable » dans notre pays.

    Le transport public reste structurellement fragile et peine à dégager des moyens financiers auprès de l’État, nécessaires aux enjeux environnementaux et économiques qui nous font face. Comment analysez-vous la situation ?

    Depuis des décennies, cette impuissance perdure. Même la maintenance indispensable au bon fonctionnement des infrastructures de transport est loin d’être assurée. Le système ferroviaire, comme le système routier, sont à la peine. Cet état des lieux nous conduit à un constat : nous sommes désormais au pied d’un « mur d’investissement » qu’il est difficile de surmonter dans la situation actuelle. Nous continuons à nous mobiliser auprès de l’État pour décrocher des aides financières mais elles sont souvent insuffisantes par rapport aux enjeux. Or, l’époque que nous traversons est rythmée par des transitions de toutes sortes qu’il nous faut absolument engager et réussir. Un changement de paradigme s’impose et les pratiques de nos voisins européens doivent nous inspirer. Je pense notamment à la Suisse que nous avons visitée avec une délégation d’élus du GART en novembre 2022. Le modèle helvétique repose sur une loi de programmation intangible car elle-même issue d’un vote populaire. Cette méthode assure un financement fléché, stable et pérenne. Trois éléments indispensables si nous voulons que les acteurs du secteur puissent s’engager efficacement, et que le système produise tous ses effets bénéfiques. Le financement n’est pas en reste et doit résulter d’une réelle détermination. Dans notre secteur de la mobilité, on estime le montant des prélèvements, c’est-à-dire impôts et taxes, à près de 60 milliards d’euros par an.

    Lors de la dernière cérémonie des vœux du GART, vous avez annoncé le lancement de travaux sur le modèle économique du transport public. Qu’en est-il exactement ?

    Au regard des enjeux et des impatiences qui s’expriment de plus en plus frontalement, il nous faut, collectivement, aller plus loin et revoir en profondeur le modèle économique du transport public.

    En leur qualité d’acteurs incontournables de la transition écologique, les collectivités doivent disposer de moyens financiers leur permettant de mettre en place des politiques d’offres plus denses et plus adaptées aux besoins de nos concitoyens. Il ne suffit pas de pointer du doigt l’automobiliste, encore faut-il lui offrir des alternatives de mobilité cohérentes et efficaces. Notre rôle d’expert et les échanges quotidiens que nous avons avec nos adhérents nous amènent à engager une réflexion sur ce sujet. Ainsi, en ce début d’année 2023, nous avons confié le soin au Conseil scientifique du GART de mener une étude pour réfléchir à un modèle économique permettant aux autorités organisatrices de la mobilité de disposer de recettes suffisantes pour mener des politiques publiques plus ambitieuses et efficaces. Les propositions issues de ce rapport seront discutées avec nos partenaires Intercommunalités de France, France urbaine et Régions de France. Nous comptons également remettre ce rapport au gouvernement.

    L’époque que nous traversons est rythmée par des transitions de toutes sortes qu’il nous faut absolument engager et réussir.

    Parmi les sept propositions du GART, vous proposez de développer un titre unique pour toutes les mobilités à l’échelle nationale. Quelle est la teneur de cette proposition ?

    Cette proposition, comme les six autres que nous avons formulées, témoigne de notre action résolument inscrite dans une démarche constructive et prospective. Ce projet est important dans la mesure où il doit permettre à chacun d’accéder à l’ensemble de l’offre publique de mobilité, sans qu’il soit nécessaire, comme c’est le cas aujourd’hui, de s’adapter à la diversité des supports et des titres propres à chaque réseau de transport. Nous souhaitons créer un choc de simplification qui bénéficiera directement à tous nos concitoyens. Ce projet concerne aussi bien les déplacements quotidiens, comme le domicile-travail notamment, que pour les déplacements ponctuels. Lors de nos vœux 2023, j’ai fait part de cette proposition innovante au ministre délégué chargé des Transports Clément Beaune qui partage notre vision. À ce titre, en notre qualité de porte-parole national des autorités organisatrices de la mobilité, nous avons participé en février dernier au hackathon « Imaginer le titre de transport de demain » organisé par l’Agence de l’innovation pour les transports. Dans les prochains mois, nous poursuivrons les travaux pour faire avancer ce sujet aux côtés de l’État et de l’ensemble des parties prenantes.

    Quel message souhaiteriez-vous adresser aux adhérents et aux membres du Club des partenaires avec lesquels le GART partage ses actions au quotidien ?

    C’est l’occasion pour moi, au nom des élus et des techniciens du GART, de saluer les autorités organisatrices de la mobilité adhérentes qui nous accordent leur confiance. Certaines depuis la création de l’association en 1981 ! Je tiens à les remercier pour leur soutien et leur fidélité. J’ai également une pensée pour les entreprises membres de notre Club des partenaires. Leur nombre ne cesse de grandir année après année et s’ouvre à de nouveaux acteurs de la filière. Notre Club réunit ainsi l’excellence de l’ingénierie française et européenne. Par leur diversité et leur engagement à nos côtés, les collectivités adhérentes associées aux entreprises du Club des partenaires nous donnent une vision exhaustive de la chaîne des mobilités. Un panorama très utile pour comprendre et maitriser encore davantage les différentes composantes du transport public.

    05 juin 2023 – Crédits : GART / B. Mazodier